Étudiante au doctorat en océanographie à l'Université du Québec à Rimouski, Corinne Pomerleau est passionnée des régions polaires. Voyageant entre l'Arctique et l'Antarctique, elle nous explique aujourd'hui son cheminement, ses recherches et ses projets d'avenir.

Par quel chemin êtes-vous passée pour choisir d’étudier l’Arctique au doctorat en océanographie?
Je suis titulaire d’un baccalauréat en biologie marine, que j’ai fait ici même à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR). Au terme de mon baccalauréat, je m’intéressais particulièrement aux espèces animales polaires. J’ai continué mes études à la maîtrise en environnement, à l’Université du Manitoba, où j’ai eu la chance de faire partie du réseau de recherche ArticNet. Ce réseau regroupe des chercheurs de plusieurs universités canadiennes, dont l’UQAR. J’ai donc conservé un lien avec les professeurs de l’UQAR et de l’Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER).

Après la maîtrise, je souhaitais continuer de travailler en recherche, tout en conservant un lien entre l’UQAR et l’Université du Manitoba. Je me suis donc inscrite au doctorat en océanographie à l’UQAR.

Mon directeur de thèse, Steve Ferguson, de l’Université du Manitoba, est expert des mammifères marins arctiques. Ma codirectrice, Gesche Winkler, de l’ISMER, m’apporte son expertise sur le zooplancton. Ma deuxième codirectrice, Véronique Lesage, de l’Institut Maurice-Lamontagne (Pêches et Océans Canada), est spécialiste des grandes baleines.

Quels aspects des grandes baleines de l’Arctique étudiez-vous en particulier?
Ma thèse de doctorat porte sur l’écologie alimentaire et la distribution spatiale de la population de baleines boréales de l’Arctique de l’est canadien et de l’ouest du Groenland. Pour effectuer mes recherches, j’utilise trois méthodes d’échantillonnage bien précises :

La télémétrie satellite aide à dresser les mouvements et les profils de plongée de la baleine, pour mieux comprendre sa répartition et son utilisation de l’habitat. Avec mon équipe, j’installe des transmetteurs satellites sur le dos des baleines pour suivre leurs mouvements.
Les biopsies, c’est-à-dire le prélèvement d’un échantillon de peau et de graisse à l’aide d’une arbalète, servent à étudier son alimentation, spécialement en regard du zooplancton.
Enfin, nous étudions les contenus de l’estomac de la baleine pour analyser sa diète.
La population de baleines boréales a été grandement décimée durant la chasse commerciale aux 19e et 20e siècles et le rétablissement du nombre d’individus demeure précaire. Les caractères biologiques particuliers de l’espèce, conjugués aux changements climatiques la rende vulnérable. Les aires d’alimentation et la quête alimentaire de la baleine boréale peuvent être affectées par la quantité et par la disposition de la glace de mer, un peu comme c’est le cas chez l’ours polaire. Dans un contexte de changements climatiques, où l’Arctique se réchauffe, il est important d’étudier toutes les espèces de l’écosystème, du zooplancton jusqu’à la baleine. Ma recherche vise à voir comment ce mammifère marin s’adaptera à un pôle Nord avec de moins en moins de glace.

Quel lien peut-on établir avec la situation environnementale en Antarctique?
D’abord, j’ai eu la chance de participer au projet Students on Ice à la fin de l’année 2010, à proximité du pôle Sud. J’avais pour mission de présenter des ateliers de vulgarisation scientifique sur les changements climatiques à des jeunes de 14 à 19 ans provenant de partout dans le monde.

Students on Ice : Corinne Pomerleau participe à une mission en Antarctique >>>

Sciences de la mer : Corinne Pomerleau remporte une bourse de la Fondation W. Garfield Weston >>>

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’Arctique est bien différent de l’Antarctique. Le pôle Nord est relativement accessible, il y existe une végétation et il s’agit d’une région maritime très stratégique sur le plan politique. À l’opposé, très peu d’humains ont mis les pieds au pôle Sud. Les mers sont plus difficiles à naviguer. Plusieurs de mes collègues chercheurs considèrent qu’un périple en Antarctique est aussi « exotique » qu’un voyage dans l’espace! Il s’agit peut-être du dernier endroit sur la Terre où la nature est encore « vierge ».

Au terme de votre doctorat, quels sont vos projets?
Je vais continuer mes recherches dans le domaine de l’océanographie en milieu polaire. Mon stage postdoctoral est déjà en préparation, et cette fois, j’irai en Colombie-Britannique et au Japon. Le Canada joue un rôle majeur dans la recherche en Arctique et je veux participer au rayonnement de notre pays dans ce secteur. Toutefois, mon réel défi sera de rendre la science accessible à la population, afin que le plus de gens possible fassent leur part pour contrer le réchauffement climatique. Chaque geste compte.