Étudiante au doctorat en océanographie à l’UQAR, Agathe Lisé-Pronovost fait partie d’un projet d’envergure internationale regroupant plus d’une cinquantaine de chercheurs en Patagonie. Son objectif : reconstituer les variations du champ magnétique depuis des dizaines de milliers d’années et comprendre les changements climatiques à partir des propriétés magnétiques des sédiments.
Mme Lisé-Pronovost a d’abord étudié le champ magnétique en Arctique de l’Ouest lors de sa maîtrise en océanographie à l’ISMER avec le professeur Guillaume St-Onge. Ses travaux sont parmi les premières études paléomagnétiques à haute résolution dans l’Arctique et ont contribué à l’observation des changements rapides du champ depuis plusieurs milliers d’années aux hautes latitudes de l’hémisphère Nord. Ainsi, la migration actuelle du pôle Nord magnétique de l’Arctique canadien vers la Sibérie n’est probablement pas un phénomène inhabituel.
Maintenant au doctorat en océanographie, toujours avec le professeur Guillaume St-Onge, Agathe Lisé-Pronovost cherche à reconstituer la variabilité du champ magnétique en Patagonie, une première à cette latitude sud du globe. « Les connaissances du champ magnétique passé dans l’hémisphère sud sont très limitées par rapport à l’hémisphère nord. Les pôles Nord et Sud ne se déplacent pas en même temps, à la même vitesse », explique la chercheuse.
Pour ce faire, elle analyse des carottes de sédiments du fond du lac Potrok Aike, au sud de l’Argentine, dont l’archive sédimentaire de 107 mètres est le plus long enregistrement climatique et environnemental en Amérique du Sud au sud des tropiques. Elle est codirigée par la professeure Claudia Gogorza, spécialiste du paléomagnétisme des lacs en Argentine, de la Universidad Nacional del Centro de la Provincia de Buenos Aires.
« Les grains de magnétite contenus dans les sédiments du lac s’orientent comme les aiguilles d’une boussole. Reconstituer la variabilité du champ magnétique dans des endroits peu documentés comme la Patagonie est essentielle aux géoscientifiques qui cherchent à mieux comprendre comment fonctionne le champ magnétique de la Terre », indique Mme Lisé-Pronovost.
De plus, l’étude à haute résolution des propriétés magnétiques des sédiments du lac Laguna Potrok aike a permis de développer un traceur magnétique de l’intensité des vents d’ouest de l’hémisphère sud depuis plus de 50 000 ans. « Les vents d’ouest sont un acteur climatique très important dans l’hémisphère sud et la Patagonie est la région source des poussières atmosphériques transportées par le vent et déposées dans l’océan Austral et sur les glaciers du continent Antarctique », poursuit Mme Lisé-Pronovost.
En Atlantique Sud, les chercheurs ont remarqué une anomalie magnétique : une zone grandissante de très faible intensité géomagnétique, qui peut perturber les satellites et autres engins spatiaux qui passent près de celle-ci. Les recherches d’Agathe Lisé-Pronovost pourraient être utiles pour mieux comprendre les phénomènes de ce genre.
Les données paléomagnétiques ont de plus permis de préciser l’âge des sédiments du lac Laguna Potrok Aike pour reconstituer l’histoire du climat. « Quelle est l’influence du climat passé en Patagonie sur le système climatique global ? La recherche en océanographie est un domaine où la multidisciplinarité est souvent la clé pour comprendre les phénomènes que l’on observe », conclut la chercheuse.
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