L’intégration du nouveau personnel enseignant d’immigration récente dans les écoles de langue française en contexte minoritaire est un enjeu au Canada. Une étude de la professeure en sciences de l’éducation Nathalie Gagnon réalisée pour la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (CTF/FCE) a permis d’identifier des stratégies et des mesures gagnantes pour favoriser leur insertion socioprofessionnelle.
La Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants est un regroupement d’organisations professionnelles et syndicales anglophones et francophones de l’enseignement dont la mission est de promouvoir une éducation publique inclusive de qualité. Depuis 2018, son Programme pour la francophonie a fait de la pénurie de personnel dans les écoles de langue française en contexte minoritaire une priorité.
Une consultation menée en 2019-2020 auprès de ses membres mettait en évidence l’importance de soutenir l’intégration et la rétention du personnel enseignant d’immigration récente pour lutter contre cette pénurie. Toutefois, si ce personnel est de plus en plus nombreux dans les écoles, on constate qu’il n’existe aucun dispositif de soutien à l’insertion professionnelle spécifiquement conçu pour répondre à leurs besoins. « On sait très bien que l’insertion en enseignement est une période qui comporte plusieurs défis, autant pour le personnel qui a évolué dans le système scolaire canadien que celui qui provient de l’international », précise la professeure Gagnon.
Pour faciliter l’entrée en carrière, plusieurs conseils scolaires ont mis en place des programmes d’insertion professionnelle qui déploient une multitude de mesures de soutien, comme des journées d’accueil et d’orientation, des activités de perfectionnement professionnel ou du mentorat. « Ces programmes-là sont utiles pour tout le monde, mais ce qu’on constate, c’est qu’ils gagnent à être ajustés et personnalisés pour répondre aux besoins particuliers du personnel enseignant d’immigration récente. Il est important de garder en tête que ces personnes ne découvrent pas seulement une nouvelle école, mais bien tout un système éducatif, avec une nouvelle culture de travail, des normes implicites différentes, un rapport à la profession qui ne va pas toujours de soi et tout ça, dans un univers culturel qui est complètement nouveau! », ajoute la professeure Gagnon.
En tout, 190 personnes enseignantes ont participé à l’enquête menée par la professeure de l’UQAR et une douzaine d’entre elles ont également pris part à des entretiens de recherche au début de l’année 2024. L’objectif était de mieux cerner les besoins de ce nouveau personnel d’immigration récente en matière d’accueil, de formation et d’accompagnement et d’identifier les pratiques d’aide à l’insertion professionnelle les plus efficaces. En plus d’enseigner dans une école de langue française en contexte minoritaire, les personnes participantes devaient être immigrantes de première génération et posséder au moins trois années d’expérience en enseignement au Canada.
« Les parcours d’insertion varient énormément d’une personne à l’autre. D’ailleurs, un peu plus de la moitié des personnes sondées ont affirmé que leur insertion a été facile ou très facile, ce qui est tout de même une excellente nouvelle! Ces gens-là arrivent avec tout un bagage d’expériences et de compétences, il ne faut pas l’oublier. Cela dit, l’enquête montre aussi que plus de la moitié juge que leur statut de personne immigrante a contribué à une insertion plus difficile, ce qui nous confirme qu’il est essentiel de tenir compte de leur réalité si l’on souhaite adoucir leur transition et veiller à leur bien-être », indique la professeure Nathalie Gagnon.
L’étude de la professeure Gagnon a permis de cibler des mesures clés pour favoriser l’intégration et la rétention de ces enseignantes et enseignants et, en bout de ligne, de formuler 25 recommandations à l’intention des conseils scolaires francophones concernant les pratiques gagnantes d’insertion professionnelle destinées au personnel enseignant d’immigration récente. « Les résultats de l’étude offrent de bonnes bases pour élaborer des mesures de soutien ou pour améliorer les pratiques d’aide à l’insertion qui sont peut-être déjà en place dans certains milieux. Même si le contexte, la réalité et les besoins sont différents d’une province et d’un territoire à un autre, la liste de recommandations proposées est une bonne invitation à la réflexion. On souhaite que chaque conseil scolaire puisse y voir des pistes ou des suggestions et qu’il puisse adopter ou adapter ces recommandations selon les particularités locales et les contextes spécifiques de son milieu. Au final, on espère que l’étude contribue à la rétention des personnes enseignantes issues de l’immigration parce que malgré les enjeux entourant leur intégration, elles apportent une richesse indéniable pour les milieux éducatifs qui les accueillent, en plus de contribuer significativement à la vitalité des communautés francophones », conclut la professeure Gagnon.
L’Enquête auprès du nouveau personnel enseignant d’immigration récente des écoles canadiennes de langue française en contexte minoritaire menée par la professeure a aussi permis d’alimenter la poursuite du projet de la CTF/FCE. Sur la base de ces résultats, un programme d’insertion professionnelle incluant formation et accompagnement a été conçu et sera expérimenté en 2025-2026, en partenariat avec des conseils scolaires de l’Alberta, du Manitoba et de l’Île-du-Prince-Édouard. La professeure Gagnon a de nouveau été mandatée, cette fois pour évaluer les retombées du programme. Ces deux recherches sont réalisées en collaboration avec le gouvernement du Canada et le Regroupement national des directions générales de l’éducation.
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