La pandémie de la COVID-19 a montré à quel point les personnes aînées ont été touchées par l’isolement dû aux mesures sanitaires, et ce, particulièrement en milieu rural. Une équipe de l’UQAR a sondé plus de 700 d’entre elles habitant dans l’Est-du-Québec pour dresser un portrait de leur expérience et proposer des pistes d’action pour contrer leur isolement.

Intitulé « Contrer l’exclusion sociale des aînés dans les milieux ruraux (CESAR) », le projet de recherche codirigé par la titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le sexe et le genre en santé au travail, la professeure Mahée Gilbert-Ouimet, et le professeur associé Marco Alberio (antérieurement titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’innovation sociale et le développement des territoires) visait à analyser la réalité, les besoins et les enjeux inhérents à la participation sociale des personnes aînées en milieu rural éloigné.

Il s’agit d’une recherche mixte, qualitative et quantitative, ayant mené à plus de 120 entrevues et à la passation d’un sondage téléphonique auprès de 600 personnes ayant témoigné de leur expérience comme aînées et aînés, comme proches aidants et comme intervenantes et intervenants. Les personnes sondées étaient réparties dans six municipalités régionales de comté de l’Est-du-Québec, soit les MRC des Basques, de Kamouraska, de Bonaventure, de la Haute-Gaspésie, de Bellechasse et des Etchemins.

« Nos résultats ont montré que la détresse psychologique était 2,4 fois plus fréquente chez les hommes et 2 fois plus présente chez les femmes se sentant isolés socialement », indique la professeure Gilbert-Ouimet. « Par ailleurs, divers enjeux liés à l’intervention sociale sont survenus en raison de l’évolution rapide des consignes sanitaires, de l’augmentation du télétravail et de la perte massive de bénévoles de plus de 70 ans qui étaient craintifs ou malades », précise le professeur Alberio.

La réduction de l’offre de transport et les retards dans la prise en charge des personnes aînées ont accentué les difficultés d’accès aux soins et aux services. En outre, la diminution des services alimentaires et des services en santé mentale a augmenté les problèmes d’isolement social chez les personnes aînées des MRC visées par le projet de recherche.

L’équipe de recherche a identifié des pistes d’action pour soutenir les décisions et les interventions à l’égard des personnes aînées. Parmi celles-ci, notons la valorisation de l’apport des personnes âgées dans l’enrichissement de la société par leur contribution sociale et leur engagement. « Nous croyons qu’il est également important de favoriser des actions publiques pour contrer l’âgisme ambiant au sein de la société et de privilégier les spécificités territoriales comme fondation de toute action publique visant les individus et les communautés », mentionne le professeur Alberio. Un outil d’aide à la prise de décision et à l’intervention a d’ailleurs été publié récemment.

Les enjeux relatifs à la mobilité et au transport public en milieu rural, l’actualisation du concept d’isolement social selon les spécificités socioterritoriales, le soutien des personnes aînées dans l’appropriation des technologies en ligne et la promotion d’une gouvernance et d’une démocratie participative réservant une place de choix aux personnes aînées figurent également au nombre des pistes identifiées par l’équipe de recherche.

« La gestion de la crise sanitaire a eu des impacts significatifs sur la capacité d’organisation et de mobilisation des actrices et des acteurs sociaux et des personnes aînées, et particulièrement dans les communautés rurales. Un accompagnement de l’État est nécessaire pour établir une plus grande justice sociospatiale fondée sur les dynamiques locales », conclut la professeure Gilbert-Ouimet.

Le projet de recherche CESAR a été réalisé avec le soutien financier du ministère de la Santé et des Services sociaux et du Fonds de recherche du Québec Société et culture. En plus de la professeure Gilbert-Ouimet et du professeur Alberio, l’équipe était constituée de Nicole Ouellet (UQAR), Cécile Van de Velde (Université de Montréal) et Majella Simard (Université de Moncton). Manon Labarchède, Mame Salah Mbaye et Sylvie Côté ont aussi collaboré au projet comme postdoctorants et coordonnatrice du projet.